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MÉMOIRE ET RAGE.

MÉMOIRE ET RAGE.

ARMÉE ZAPATISTE DE LIBÉRATION NATIONALE.

MEXIQUE.

26 septembre 2024

Aux mères, pères, condisciples, compañeras et compañeros des Absents d’Ayotzinapa,

À celles et ceux qui cherchent,

Nous savons qu’il n’a pas été facile d’arriver jusqu’à cette page du calendrier.

Nous savons la douleur et la rage de comprendre maintenant que depuis là-haut, peu importe la couleur, le mépris et le mensonge continuent.

Nous savons que ce n’est pas seulement l’espoir de trouver celles et ceux qui manquent qui vous a fait bouger. Car, durant ces années, votre douleur s’est propagée jusqu’aux milliers de proches des personnes disparues dans ce pays.

Et chaque mère, chaque père, proche, ami, a approfondi cette douleur jusqu’à atteindre le lit de rage de qui cherche et ne trouve pas.

Ni vérité, ni justice.

Ni la plus minime empathie de la part de qui détient le Pouvoir uniquement pour se vanter et fanfaronner mais pas pour servir ni résoudre. Le bourreau prétendant se faire passer pour la victime.

Sur ce long chemin, vous avez rencontré des trahisons de la part de celles et ceux qui ont juste utilisé votre douleur pour avoir un poste, une cause pour changer de couleur au sein du gouvernement, ou, pour les plus misérables, avoir une paie.

Et chez les mauvais gouvernements, le regard du chasseur continue de chercher sa prochaine victime.

Mais…

Nous, les peuples zapatistes, nous croyons que nous avons en commun avec vous ce sentiment qui ne se trouve que dans le cœur des personnes qui luttent…

Car un jour viendra où les figures des personnes qui cherchent sans repos celles et ceux qui leur manquent, des pères et des mères des absents d’Ayotzinapa, de leurs condisciples, de leurs professeurs, de leurs proches et de leurs amis, s’associeront à deux mots dont la réelle absence fait souffrir aujourd’hui cette géographie : vérité et justice.

Et parce qu’un jour viendra où le fait d’être étudiant, homme ou femme, d’une école normale rurale ou d’où que ce soit, employé, travailleuse, adulte ou âgé, ne sera plus un motif de persécution, de mépris, de disparition, de mort.

Mais pour que ce jour vienne, il faut continuer. Si nous ne pouvons pas encore léguer cette Vérité et cette Justice à celles et ceux qui nous suivent en calendriers et géographies, nous pouvons cependant leur léguer la rage, la mémoire et la dignité nécessaires pour ne pas se rendre, ne pas se vendre, ne pas abandonner.

Si nous n’y arrivons pas, il y aura toujours une nuit d’Iguala traquant celles et ceux d’en bas, leur sang jeune, et iels seront toujours coupables de rébellion.

S’il n’y a ni Vérité ni Justice, alors que ne manquent pas la rage ni la mémoire.

Depuis les montagnes du Sud-est mexicain,

Au nom des femmes, des hommes, des anciens, des enfants zapatistes,

Sous-commandant insurgé Moisés,

Mexique, 26 septembre 2024.

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