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Palabra del Ejército Zapatista de Liberación Nacional

Oct062024

Images de Ponts Impossibles : II Un livre

Images de Ponts Impossibles :

    II

    Un livre.

Août 2024.

  Le livre arriva quelques jours auparavant. À ce moment-là, les cheffes et chefs zapatistes étaient en réunion. Iels analysaient, valorisaient, proposaient. Le thème était le commun. Pourvu que le Sous-commandant insurgé Moises vous fasse connaître un jour le résultat du bilan. À savoir, comment ça marche toute cette histoire du commun en terres zapatistes.

  Il se fait que j’étais en train de préparer une prise de parole que je devais assurer. C’est alors qu’arriva le livre. Je le feuilletai seulement. Il était dans une langue que nous ne connaissons pas, que je ne connais pas, et, après quelques recherches, je découvris que c’était du « slovène ». Je suppose qu’il y a une édition en anglais (on le devine dans le sommaire), mais à nous, on nous avait envoyé l’édition en « slovène ».

  J’apportai donc le livre à la réunion et je le montrai aux chefs et aux cheffes. Je leur demandai pourquoi ou qu’est-ce qu’il s’était passé pour que leur parole, comme zapatistes, apparaisse dans une langue dont, il y a plus de 30 ans, on ne connaissait même pas l’existence.

  J’attendis quelques secondes et poursuivis : « Moi, je vais vous dire pourquoi. Et je vais vous raconter une histoire. Votre histoire. L’histoire de l’Armée zapatiste de libération nationale. »

-*-

  À la fin de la discussion et à l’heure du pozol, iels se rassemblèrent autour du livre. Je leur demandai de quoi parlait le livre. Iels répondirent en souriant qu’iels ne le savaient pas. Je leur dis : « Et s’ils nous insultaient et que nous, on le savait pas, parce qu’on ne comprend pas cette langue ? ». « Je ne crois pas », répondit l’un d’eux, qui faisait partie de la délégation, « parce qu’ils nous ont invités alors qu’ils ne nous connaissent même pas, ils nous ont nourris, hébergés chez eux et nous ont montré ce qu’était leur lutte. Ils nous ont enseigné des choses, quoi. Cela veut donc dire qu’ils nous respectent, comme nous, on les respecte aussi. Je ne crois pas que dans ce livre, ils disent du mal. »

  Une compañera, déléguée elle aussi, regardait fixement le livre. Elle le prit dans ses mains et me dit, avec un regard de défi : « Écoute capitaine sup, je te dis clairement qu’on ne comprend pas leurs mots qui sont écrits là. Mais on le sait et on comprend leur lutte parce que ces personnes nous l’ont montrée. Je veux dire qu’on l’a vue et qu’on l’a apprise. La langue de ces personnes n’a donc pas d’importance, ce qui importe c’est ce qu’elles sont. Et ce que l’on a vu, c’est que ce sont des personnes qui luttent. »

  Un autre compa intervint :  « Et ils sont comme nous, les peuples zapatistes, parce que peu leur importe si tu es d’une «autre» planète, ce qui compte, c’est que tu luttes contre l’Hydre. Parce que «la» système se moque de la langue que tu parles, de toute façon, «elle» t’exploite, te réprime, te vole, te méprise. »

-*-

  « Il se trouve que lorsque l’on est arrivées dans ce lieu, on avait peur, on était gênées. On avait peur de parler. Parce qu’on voyait que les gens de là-bas étaient très différents. Enfin, je veux dire qu’ils sont très grands et nous très petites. Et puis, ils sont «pâles» et nous, notre peau est sombre. Mais ce qui pour nous a été le plus compliqué, c’était qu’iels parlaient pas le castillan, mais qu’iels parlaient leur langue. Au moment où on devait prendre la parole, comme on l’avait fait avec d’autres équipes de compas, là les compas nous motivaient à prendre la parole, donc on s’est lancées. Encore qu’à vrai dire, oui, ça a été difficile pour nous, parce que, lorsque l’on était en train d’expliquer, le traducteur nous arrêtait tout le temps parce qu’il devait traduire chaque partie. Et on a fait avec. On devait parler petit peu par petit peu pour que ça puisse être bien traduit et en entier. Et le traducteur, il y a des mots en castilla qu’il ne comprenait pas. Nous, on devait être très attentives et concentrées pour ne pas oublier ce qu’on devait expliquer. Ils sont donc différents en tout, mais ils sont comme nous dans la lutte. »

-*-

  « C’est dans les Balkans », me précisa dès le début le Sous-commandant Moises. « Eux, ils ne se sont pas organisés par pays pour le Voyage pour la Vie, mais à travers toute une zone qu’ils appellent comme ça, les Balkans. Ils étaient bien organisés. Comme ils ne reconnaissent pas de frontières, ils ne se battent pas parce que toi, tu es de tel ou tel pays ou que tu as telle ou telle façon de faire. Au moment de leur parler du zapatisme, je leur ai dit qu’on nous accusait de vouloir «balkaniser» le pays. Alors ils ont applaudi et acclamé. Ensuite, j’ai compris que, pour eux, ce mot veut dire «unir lorsqu’il y a un accord» parce que, malgré des guerres très dures, eux, ils luttent ensemble, mais séparés. Ils s’unissent dans la lutte contre la division que leur imposent ceux d’en haut. Mais ce n’est pas qu’il y en ait un qui commande et un qui obéisse, non. Ils se mettent d’accord. Ils se coordonnent quoi. Et aussi ils travaillent la terre. Bref, eux aussi luttent pour la vie. Pour nous, avec le voyage, avec ce Tour, ce qui a changé, c’est qu’avant, on ne savait pas qu’il y avait d’autres peuples comme nous qui ne se rendent pas au monstre et qui se rebellent. Le moment des Balkans, ça a été un très bon apprentissage, parce que, eux, ils s’unissent, mais ils ne perdent pas leur indépendance, c’est-à-dire leur particularité. Quand il y a quelque chose de commun, alors ils se mettent rapidement d’accord et, sans perdre ce que chacun est, ils deviennent un. Ils sont donc séparés, mais ensemble. Si quelqu’un peut comprendre cela du commun que nous, nous proposons, ce sont ces organisations sœurs. Sur la route des Balkans, il y avait le tout et les parties. »

-*-

  Le Sous-commandant insurgé Moises poursuivit : « Étant donné que, comme le peuple Saami, ils ne se sont pas présentés en tant que pays, je me suis réuni avec eux pour savoir comment ils voulaient qu’on les appelle. Ils m’ont répondu quelque chose comme ça :

  Pour nous, l’expression correcte, c’est la route des Balkans. Ça n’est pas (seulement) une description géographique, mais c’est surtout politique.

 Durant des siècles, les Balkans ont été l’Autre de l’Europe, la partie sauvage, indomptée, non civilisée de l’Europe : un terrain d’essais pour toutes les formes d’exploitation coloniale, guerrière, capitaliste et extractiviste, d’un côté, et, de l’autre, un espace dans lequel tous les stéréotypes orientalistes de l’Europe sont présents, projetés sur l’autre.

 Ça a été un espace de grands conflits nationalistes, entraînant beaucoup de guerres, y compris celle des années 90 qui a été pour notre génération, née durant la dernière décennie de la Yougoslavie socialiste, une expérience très formative quand nous étions enfants.

 Donc, quand nous, en tant qu’anarchistes, antifascistes et anti-autoritaires, nous avons commencé à être politiquement actifs, la perspective balkanique a toujours été claire pour nous : l’unique façon de dépasser les divisions nationalistes et la haine, c’est de construire les Balkans à partir d’en bas et qu’il y ait connexion entre chaque collectif et mouvement qui s’y trouvent. Durant les deux dernières décennies, depuis les années de l’anti-mondialisation, la lutte contre les guerres en Afghanistan et en Irak et, plus tard, toutes les luttes des travailleurs, des étudiants, la solidarité des migrants, les féministes, les luttes environnementales, etc., se sont réalisées à travers les Balkans.

  Nous ne sommes pas connectés au sein d’une organisation, nous fonctionnons plutôt comme des collectifs indépendants dans chaque territoire (connus en tant que différents États balkaniques, tels que la Slovénie, la Croatie, la Serbie, la Roumanie, la Bulgarie, la Grèce, la Macédoine, le Kosovo, etc.) Nous avons un évènement en commun une fois par an (le Balkan anarchist Bookfair), qui est un espace de rencontre et de réflexion pour tous les collectifs qui, autrement, opèrent sur leurs propres territoires. À certaines occasions, comme dans le cas de la visite zapatiste ou de la route migrante en 2015, nous travaillons ensemble dans ce réseau décentralisé de solidarité balkanique.

 Donc, en résumé, pour nous, le concept de Route des Balkans est un concept politique, et nous préférons l’utiliser, au lieu de parler d’activités dans chaque pays. La préparation de la visite zapatiste s’est faite à travers des réunions communes de toutes les coordinations nationales dans différents territoires, et il y a toujours eu ce sentiment international balkanique, pour travailler ensemble et créer un espace commun de lutte. »

-*-

Voilà. Santé et que les tentatives d’hégémonie et d’homogénéisation ne gâchent pas tout… de nouveau.

Depuis les montagnes du Sud-est mexicain.

Le Capitaine.
Août 2024

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