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Palabra del Ejército Zapatista de Liberación Nacional

Dic122023

Treizième partie : DEUX MATCHS DE FOOT ET UNE MÊME RÉBELLION.

Treizième partie : DEUX MATCHS DE FOOT ET UNE MÊME RÉBELLION.

« Le football, c’est la continuation de la politique par d’autres moyens ».
Don Durito de la Lacandone (DD à des fins juridiques)

 

Novembre 2023.

I- À la veille de la Traversée pour la vie – chapitre Europe.

On a reçu un défi footballistique d’une équipe féminine de l’Europe qui résiste et qui lutte.
Le SupGaleano s’est auto-désigné « directeur technique » de l’équipe « Ixchel – Ramona », formée de miliciennes. Bien entendu, le Sup a étudié l’équipe rivale. Il réunit les compañeras qui feront le voyage. Il analyse dans le détail les aptitudes et les caractéristiques de chacune des joueuses. Il se rap-proche du Sous-commandant Moisés et lui donne son diagnostic : « On va se faire massacrer ». Le SubMoy reste là à le regarder avec une tête de « Et alors ? » comme si c’était une évidence. Mais le désormais défunt n’a pas terminé : « Mais j’ai un plan secret, comme dit la Dení. Avec ça, on va révo-lutionner la balle au pied et on redéfinira son essence : le jeu. »

Le Sous-commandant insurgé Moisés, coordinateur du voyage, est bien occupé par les cours de pré-paration, les actes de naissances, les passeports et l’élaboration de l’itinéraire à suivre, il laisse donc le SupGaleano procéder « à sa discrétion ». Le futur défunt sourit et conclut : « Discrétion, c’est mon deuxième nom » (ne me demandez pas quel était le premier car il faudrait plusieurs pages pour vous l’expliquer).

Le défunt en devenir commence la préparation de l’équipe féminine. Mais, pour que sa stratégie soit un succès, il a besoin du soutien du terrifiant, terrible et terrorisant « Comando Palomitas » [ndt : Com-mando Pop Corn, voir le Voyage pour la vie], lequel est, à ce moment-même, en train d’essayer de faire un trou dans le navire-école où s’est préparé le dénommé « Escadron 421 ».

Désillusionnés car, avant que soit terminé leur travail de sape sous la ligne de flottaison, le vaisseau s’est transformé en un imposant avion bimoteur, ils allèrent consulter le SupGaleano pour savoir comment ils pouvaient faire pour mettre le feu à l’avion. Le Sup les convainquit que c’était mieux de ne pas le brûler, qu’il valait mieux attendre qu’il soit en plein vol pour l’abattre de l’intérieur. Amado le bien-aimé et le Chinto protestèrent : si l’avion tombe, le Comando Palomitas tombera avec. Le Sup répondit que ce n’était pas le moment de s’attarder sur des broutilles. De plus, le Commando était re-quis pour une autre tâche plus importante, faut-il le répéter, que le sabotage d’un voyage aérien pour lequel on ne réunissait même pas encore l’argent des billets, sans parler de l’absence de passeports et du fait que la plupart des membres de la dénommée « Division aéroportée La Extemporánea » étaient malades à bord de la bétaillère servant au transport collectif.
Une fois réunis le Comando Palomitas, le Sup, le Tzotz, le Tragón et la Pelusa dans le bunker ultra-secret qui se trouve sur l’estrade du Puy de la zone Tzotz Choj [ndt : autrefois Caracol de Morelia], ils commencèrent à affiner les détails de ce qui serait, dès lors, le mondialement connu comme le « Bril-lant et Excellent Plan pour Dérouter un Rival Mieux Préparé, Entraîné et Équipé que Nous » (BEPDRMPEEN, pour ses sigles en français), intitulé « Même si elles ont une meilleure technique que nous et qu’elles dominent mieux le ballon ».

La réunion top-secret se déroula normalement. C’est-à-dire que le Chuy vola à la Lupita sa sucette de chamoy, la Verónica donna une claque au Chuy et, comme si elle était le Gouvernement Suprême, elle garda la sucette du Chuy, celle de la Lupita et la sienne. Le Chinto et Amado le bien-aimé insistaient sur le fait que leurs vélos s’étaient cassés « tout seuls » et que le Monarca devait voir comment les réparer. La Pelusa, le Tragón y le Tzotz regardaient la table à la recherche de biscuits, et le Sup dispen-sait le cours magistral de « Comment gagner un match de foot avec tous les éléments contre soi ».

Le chaos apparent s’apaisa quand le Sup sortit, d’on ne sait d’où, une boîte de « Choki Le Biscuit Dia-bolique », et seulement ensuite – après la distribution de 5 paquets –, ils se répartirent les missions, firent le chronogramme et se goinfrèrent avec le sixième paquet « en honneur aux futurs morts au combat ». « Et mortes au combat », se sentit obligé d’ajouter le Chuy, juste pour recevoir de la Verónica une autre gifle en mode « l’égalité de genre ne s’applique pas dans le malheur ». La Lupita approuva l’action en brandissant la sucette de chamoy que lui avait donné le Sup pour qu’elle arrête de pleurer.

Le « trois fois T » Comando Palomitas, le Sup et l’aile canine du commando partirent pour la pépi-nière et, une fois les miliciennes réunies, on expliqua et pratiqua le nouveau schéma « passif-agressif » qui, comme il se doit, avait pour noyau principal le célèbre Commando.

En suivant la vieille et approuvée règle zapatiste du « Ne joue pas avec les règles de l’ennemi », le Sup développa une sorte de mélange entre rugby, dramaturgie style dix-neuvième siècle, avec un peu de manga, du ciné très à la Hollywood croisement avec Cannes, avec l’impressionnisme de Monet, une pincée d’Allan Poe croisée avec Conan Doyle, quelque chose de l’épopée de Cervantès, la brièveté de Joyce, la perspective de Buñuel, une pincée de Brecht mélangée à Beckett, la saveur des tacos al pas-tor, une cumbia très ralentie – à peine effleurée quoi – , la Anita Tijoux et la Shadia Mansour brisant les frontières – Palestine libre –, et, bon, je n’ai pas tout noté, mais il ne manquait plus que le ballon.

La stratégie en question comportait 3 phases :

La première était que la Verónica attrapait une petite poupée zapatiste et qu’elle se dirigeait, décidée, vers le but adverse, elle se plantait face à la gardienne ennemie et elle lui parlait en Cho’ol. La gar-dienne, évidemment, ne comprenait rien, mais là, entraient en jeu la Lupita et la Esperanza Zapatista qui lui traduisaient en signes que la petite fille voulait lui donner la poupée. Et la Esperanza, comme son nom l’indique, se proposait pour la prendre en photo avec la petite et la poupée. Pour la photo, elle lui disait de laisser le ballon parce que la Verónica voulait qu’elle la prenne dans ses bras. Au moment où cela se passait, la Esperanza tirait le ballon « au fond des filets » et toute l’équipe criait « But ! ». Ce plan se pratiqua une infinité de fois avec succès. La seule chose qu’on n’a pas réussi à faire, fut que la Verónica n’arrache pas la poupée à la gardienne, avant de partir en courant.

La deuxième variante consistait à ce que la gardienne zapatiste reçoive le ballon, elle le plaçait sous son maillot, comme si elle était enceinte, et elle commençait à marcher comme si tel était le cas. Toute l’équipe zapatiste s’approchait pour l’aider et l’emmener au poste de secours. Évidemment, comme elles étaient en territoire étranger, les compañeras se trompaient et elles se retrouvaient face à la gardienne ennemie, où, miracle, la gardienne zapatiste « accouchait » du ballon qui, en roulant à peine, dépassait la ligne ennemie et donnait naissance à un but face auquel Messi et Cristiano peuvent aller se rhabiller. Pendant ce temps-là, le TTT Comando Palomitas encerclait la sœur responsable du tableau pour « l’exhorter » d’accorder le point si durement obtenu « avec le sacrifice de la compañera zapatiste et de son bébé-ballon ».

 

La troisième variante impliquait un risque pour la protagoniste, car elle devait feindre de s’évanouir. Le plan se pratiqua une seule fois dans la pépinière car là-bas, le terrain est en gravats (des cailloux et du sable), et on espérait que, sur le terrain de l’ennemi, il y aurait de l’herbe. La compañera devait s’éva-nouir au milieu du terrain. Le Sous-commandant Moisés, alarmé, courrait pour aller voir la com-pañera et, avec lui, tout le banc zapatiste se renverserait. Toutes les compañeras crieraient, dans leurs langues respectives, pour appeler le service médical. Comme on pouvait l’imaginer, l’ennemi n’aurait pas de poste de secours, on aurait donc anticipé et préparé une civière. L’arbitre voudrait appeler les secours, mais le SubMoisés invoquerait les us et coutumes des peuples originaires, et ce sont les zapa-tistes eux-mêmes qui porteraient l’évanouie pour la placer sur le brancard. Troublées par la douleur et le chagrin de voir leur sœur de lutte tombée au combat, les miliciennes ne réussiraient pas à se diriger vers le banc en portant la civière, elles arriveraient donc jusqu’au but ennemi. À cet instant, les tous premiers dieux, ceux qui ont fait naître le monde, feraient leur travail et la compa blessée se réveillerait sans avoir besoin qu’aucun crapaud mâle, qu’il soit issu de la plèbe ou de la royauté, ne l’embrasse, et elle trouverait le ballon à ses pieds, juste sur la ligne de but et, avec la pointe du pied, elle scellerait le destin. Il fallait s’attendre à ce que, ranimées par la joie de voir leur compañera saine et sauve, les mili-ciennes crieraient : « Buuut ! » À ce moment-là, le Comando Palomitas serait déjà au pied du tableau de scores afin de s’assurer que la vie soit célébrée.
La quatrième, je ne m’en rappelle plus très bien (je sais que j’ai dit qu’il y en avait 3, mais les trois mousquetaires n’étaient-ils pas 4 ?), même si elle était très semblable aux trois autres en ingéniosité, en créativité et en espièglerie.

Selon ce que me dirent les miliciennes à leur retour, en territoires appelés « Italie » et « État espa-gnol », les sœurs ennemies comprirent très rapidement ce qu’il en était et commencèrent à jouer avec le même style. Je ne sais pas si cela pourrait être qualifié par la FIFA comme de la balle au pied mais, à en juger sur les photos et dans les vidéos qu’elles m’ont montrées, ce fut la fête. Résultat : il n’y eut ni gagnant ni perdant… et la Verónica revint avec la petite poupée qui, bien entendu, appartenait à l’actuel défunt SupGaleano. Et non, elle ne la lui rendit pas.

« Et ce fut donc le message pour les géographies du monde entier : ne joue pas selon les règles de ton ennemi, crée tes propres règles » m’a déclaré le SupGaleano avant de rendre son dernier souffle.

-*-

II- Combien de Chypres tiennent dans un match de foot ?

Cela, c’est ce que le Sous-commandant Moisés m’a rapporté en me racontant les détails et anecdotes du dénommé « chapitre Europe » de la Traversée pour la Vie. Ce que je vais vous raconter ensuite, c’est ce que j’ai pu sauver de la narration, pleine d’admiration et de respect, du Sous-commandant Moisés.

« Il y a une géographie qui s’appelle Chypre. Bon, il se fait qu’elle est divisée, ou plutôt morcelée. Il y a la chypriote, il y a la gréco-chypriote et il y a la turco-chypriote et je ne me souviens plus combien d’autres qui se dénomment chypriote. Les capitalistes ont divisé cette terre, l’ont morcelée. Et ils ont divisé aussi ses habitants, sa langue, son histoire, sa culture. Et il en résulte, que bien qu’étant une pe-tite île, tous les friqués la veulent et, comme ils le font en soi, ils se la divisent, mais chaque partie veut le morceau de l’autre. C’est-à-dire qu’en fait, au milieu des puissants et de leurs guerres, il reste les peuples. »
Bon, il y a donc une équipe de foot dans cette géographie qu’on appelle Chypre. Elle a de bons joueurs et ce sont des professionnels. C’est-à-dire que leur travail, c’est de jouer au foot. Et donc, comme ils perdent plusieurs matchs, ils se réunissent entre eux pour analyser la situation et ils se disent que, si ils perdent, c’est parce que la stratégie des matchs est mauvaise. Ils vont trouver le propriétaire de l’équipe, c’est-à-dire le patron, et ils lui disent que c’est pour cette raison qu’ils perdent, qu’ils ont déjà réfléchi à une stratégie bien meilleure et que, grâce à elle, ils vont gagner plus de matchs.

Le patron, c’est-à-dire le propriétaire de l’équipe, les regarde avec mépris et leur dit : « Vous, vous gagnez ou vous perdez à ma convenance. Parfois, ça me convient que vous perdiez et on va continuer comme ça. »

Les joueurs savent très bien jouer mais en plus, ils ont bon cœur. Et donc, ils se rebellent comme on dit. Ils se déclarent « résistance et rébellion », mais dans leur langue. Et ils envoient au diable le pro-priétaire de l’équipe, c’est-à-dire le patron. Et ils montent donc leur propre équipe de foot. Et ils s’orga-nisent et construisent leur stade. Cette terre est divisée, et donc, au milieu, on dit « en terre de per-sonne », et c’est là qu’ils font leur stade et qu’ils invitent qui le veut à jouer et à s’entraîner. Les autres groupes et collectifs qui luttent les soutiennent et ils s’organisent bien. Qu’importe si tu es chypriote, gréco-chypriote, turco-chypriote ou chypriotejesaispasquoi. Ce n’est pas payant, chacun donne ce qu’il veut sur la base du volontariat. C’est-à-dire que, comme on dit, le pognon, c’est pas ce qui compte. Et donc, tous les X temps, ils font leurs matchs et il n’y a pas de divisions selon les nationalités, ou les religions, ou les drapeaux, il n’y a que du foot. Et c’est comme une fête.

C’est-à-dire, comme on dit, que ces frères ont brisé les frontières qu’avaient mises les patrons et les propriétaires.

« C’est-à-dire qu’ils ont fait comme leur caracol. Ils ont un caracol de foot ! Je leur ai dit qu’on verrait quand est-ce qu’on pourrait faire un match de foot là-bas sur leur terre ou ici en terre de personne », dit le Sous-commandant insurgé Moisés, porte-parole des communautés zapatistes, chef de l’EZLN et coordinateur de la Traversée pour la Vie.

-*-

Bien. Santé et que les jeux, comme le sont les virées à vélo, ne soient pas une compétition mais des prétextes pour partager du temps entre gens différents.

J’en atteste.

Depuis les montagnes du Sud-est mexicain.

Le Capitaine.
Mexique, novembre 2023. 40, 30, 20, 10, 2 ans après.

Musique : « Somos Sur », interprété par Ana Tijoux et Shadia Mansour
Images du match de football entre l’équipe Ixchel-Ramona et celle des sœurs ennemies italiennes prises dans la géographie qu’on appelle Rome, Italie, en novembre 2021. Agrémentées d’images de la mobilisation des pueblos zapatistes contre les guerres en 2022. Tercios Compas. Copyleft novembre 2023.

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